Salim Boulaich, fondateur de Pabete : « La solidaritĂ©, lâaccessibilitĂ© et la confiance sont au cĆur de notre concept »
Pabete, la plateforme qui aime les bĂȘtes
1. Peux-tu nous parler de ton parcours ? Comment en es-tu venu à créer Pabete ?
S.M: Je suis titulaire dâun diplĂŽme dâingĂ©nieur en informatique de gestion. Ă mes dĂ©buts, jâai travaillĂ© dans de grands groupes avec des projets assez consĂ©quents. Jâai Ă©tĂ© chef de projet mais ce nâest pas ce que jâai prĂ©fĂ©rĂ© car avec des projets de cette taille, on ne voit ni lâutilitĂ© ni les fruits de son travail.
Jâai plutĂŽt une fibre dâentrepreneur. Avant Pabete, je me suis lancĂ© dans les huiles du monde en travaillant principalement avec des coopĂ©ratives. Ăa nâa pas marchĂ© parce que les cosmĂ©tiques sont un secteur trĂšs complexe et rĂ©glementĂ©, et je nâavais pas fait mes recherches avant. CâĂ©tait une erreur de dĂ©butant mais ça mâa appris beaucoup de choses!
Puis, il y a 2 ans, jâai créé Pabete. LâidĂ©e mâest venue Ă lâoccasion dâune dĂ©convenue. Je suis propriĂ©taire dâune chienne et jâavais pour habitude, comme beaucoup dâentre nous, de la confier Ă mes proches lorsque je partais en vacances. Mais ce cercle nâĂ©tant pas toujours disponible, jâai dĂ» faire appel Ă un professionnel pour garder ma chienne. Au bout de 3 semaines de garde, lorsque je lâai rĂ©cupĂ©rĂ©e, jâai constatĂ© une fois arrivĂ© chez moi quâelle avait des plaies sur la peau. Lorsque jâai demandĂ© au responsable des explications, il a dĂ©clinĂ© toute responsabilitĂ©, je nâai jamais eu dâexplications.
Câest lĂ que je me suis dit pourquoi ne pas proposer une solution en ce sens, peu onĂ©reuse et basĂ©e sur la confiance. En faisant mes recherches, jâai constatĂ© que prĂšs de 70% des gens ayant des animaux privilĂ©giaient leurs proches pour des soucis de confiance et financiers. En gĂ©nĂ©ral, il faut compter entre 8 et 25 euros par jour pour faire garder son animal. Or, il nâexiste pas de systĂšme de garde dâanimaux entre personnes de confiance et Ă prix accessible. Beaucoup de gens ne peuvent pas se permettre de faire appel Ă ces services, ce qui complique les choses et peut amener parfois Ă des abandons.
2. Quelle est la mission de Pabete et comment ça fonctionne?
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S.M: Pabete est une plateforme collaborative de garde dâanimaux de compagnie entre particuliers. Lâobjectif est de rendre accessible la garde dâanimaux Ă tous, pour tous les budgets, entre gens de confiance et de lutter contre lâabandon.
Le fonctionnement est simple. Comme toute plateforme sur internet, il faut sâinscrire et complĂ©ter son profil. LâaccĂšs est gratuit.
On demande Ă chaque nouvel utilisateur de nous fournir des justificatifs pour valider son identitĂ©. Câest un critĂšre trĂšs important pour nous si on veut Ă©tablir un cadre de confiance et de bienveillance pour confier nos animaux.
La plateforme fonctionne avec une monnaie interne, les « bĂ©bĂȘtes », selon un systĂšme de troc. Chaque bĂ©bĂȘte coĂ»te deux euros et correspond Ă une journĂ©e de garde. Pour avoir des bĂ©bĂȘtes, il suffit soit de payer, soit de garder Ă son tour lâanimal dâun membre de la communautĂ©. Si une personne veut faire garder son chien pendant 3 jours, elle doit donner 3 bĂ©bĂȘtes, ce qui Ă©quivaut Ă 6 euros. La personne qui a gardĂ© lâanimal et qui reçoit les bĂ©bĂȘtes peut Ă son tour faire garder son animal pendant 3 jours, gratuitement.
3. Comment vous vous rémunérez avec ce systÚme de troc ? Quel est votre business model ?
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S.M: Actuellement, je fais tourner la boutique avec mes propres fonds car pour lâinstant, nos rentrĂ©es dâargent grĂące aux bĂ©bĂȘtes sont encore symboliques. La plateforme compte aujourdâhui quelques milliers de personnes, ce qui nâest pas suffisant pour engendrer des rĂ©munĂ©rations, mais je ne suis pas inquiet.
Notre communautĂ© grandit de jour en jour et est de qualitĂ©, câest ce qui mâintĂ©resse le plus.
Pour rĂ©pondre Ă ta question, notre business model tourne principalement autour de notre systĂšme de monnaie interne. Cela peut Ă©ventuellement Ă©voluer avec le temps vu que nous avons encore plein dâidĂ©es dans les cartons, mais ça restera en parfaite cohĂ©rence avec mes valeurs et celles partagĂ©es avec les adhĂ©rents.
Ce qui est certain, câest que nous placerons toujours le bien-ĂȘtre animal au centre de notre dĂ©marche.
4. Comment faites-vous générer cette confiance et la mettre en avant?
S.M: On opĂšre une sĂ©lection dĂšs lâentrĂ©e dans la plateforme. Ă chaque inscription, on demande des piĂšces justificatives : piĂšce dâidentitĂ© et justificatif de domicile. Cette condition permet dâeffectuer un premier tri des personnes qui ont vraiment envie de sâengager dans cette plateforme.
Ensuite, on a mis en place, comme la plupart des plateformes, un systĂšme de notation avec avis et recommandations.
Enfin, nous faisons trĂšs attention aux Ă©changes qui sâopĂšrent sur la plateforme. DĂšs que nous avons un doute, nous entrons en contact avec la personne pour Ă©changer avec elle sur ses motivations et sur son expĂ©rience avec les animaux.
La plateforme accueille des gens qui ont dĂ©jĂ des animaux et dâautres qui nâen nâont pas mais qui ont envie de garder des animaux. Pour la 1Ăšre catĂ©gorie, il est trĂšs facile de voir le rapport quâils ont avec leurs animaux, notamment dans la maniĂšre quâils ont de le dĂ©crire. Pour les gens qui nâont pas dâanimaux, on Ă©change systĂ©matiquement avec eux.
5. Comment avez-vous recruté vos premiers utilisateurs ?
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S.M: Quand la plateforme Ă©tait prĂȘte, on a fait un salon animalier pour se faire connaĂźtre. Lâerreur quâon a commise, câest quâon a pas fait de version beta avant ! AprĂšs quelques jours, on sâĂ©tonnait de ne voir personne sâinscrire, jusquâĂ ce quâune personne nous appelle pour nous dire quâil y avait un problĂšme Ă lâinscription. Et effectivement, il y avait un problĂšme avec le code, ça la fout mal !
Peu aprÚs, on a été pas mal dans les médias, ce qui nous a ramené des utilisateurs, et le bouche à oreille fonctionne bien. Nous accueillons chaque jour de nouveaux membres.
Nous nâavons pas spĂ©cialement mis en place de stratĂ©gie de communication. Dâabord parce que nous ne sommes que deux et nous nâavons pas le temps de nous y atteler. On communique sur les rĂ©seaux sociaux, mais ça reste un minimum et on a 2 ou 3 trucs qui fonctionnent bien pour amener de nouveaux utilisateurs, mais ça, on le garde pour nous !
6. Comment faites-vous pour maintenir cette communautĂ© dâutilisateurs active et favoriser la rĂ©tention?
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S.M: On Ă©change beaucoup avec eux, dĂšs le dĂ©but. Câest dâailleurs la raison pour laquelle notre dĂ©veloppement se fait lentement, car on passe beaucoup de temps sur le recrutement des nouveaux membres. La confiance est au cĆur de notre activitĂ©, et on veut des gens qui partagent les mĂȘmes valeurs et la mĂȘme philosophie que nous, Ă savoir, lâamour des animaux et la solidaritĂ©.
Nous nâavons pas encore les ressources humaines pour faire face Ă une croissance rapide dâutilisateurs. On privilĂ©gie donc un dĂ©veloppement slow pour vraiment prendre le temps de construire des relations de confiance avec notre communautĂ©.
Et ça marche plutĂŽt bien : les gens sont trĂšs actifs sur la plateforme, et nous avons beaucoup de retours de leur part. Ils nous permettent dâamĂ©liorer les fonctionnalitĂ©s, nous donnent de nouvelles idĂ©es, câest trĂšs riche.
Je pense que cet engagement de la communautĂ© est principalement dĂ» au fait quâil ne sâagisse pas dâune plateforme commerciale et que tout le systĂšme soit basĂ© sur la solidaritĂ©.
7. Quelles sont les erreurs que tu as commises ?
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S.M: La plus grosse erreur que jâai commise est de vouloir ressembler Ă nos concurrents. On a Ă©normĂ©ment pivotĂ© Ă cause de cela et perdu plus de six mois.
Au dĂ©but, on avait mis en place un systĂšme dâabonnement et dâautres fonctionnalitĂ©s inutiles, mais ça ne correspondait pas Ă lâesprit de la plateforme et aux valeurs que lâon voulait mettre en avant. On voulait rendre la garde dâanimaux accessible Ă tous tout en maitrisant la qualitĂ© des prestations.
Nous nous sommes donc focalisé sur ce qui nous définit, et nous avons gagné en force, malgré notre jeune ùge.
Nous menons des actions formidables auprĂšs des associations de protection animale.
8. Peux-tu nous donner des exemples dâactions que vous avez menĂ©es ?
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S.M: Pendant le 1er confinement, nous avons ouvert lâaccĂšs Ă la plateforme au personnel soignant et Ă toute personne touchĂ©e de prĂšs ou de loin par le virus, pour leur venir en aide. Pendant cette pĂ©riode, on a vu le nombre dâabandon dâanimaux augmenter parce que les gens avaient peur quâils leur transmettent le virus... On a Ă©galement vu des personnes dĂ©sinfecter les pattes de leur chien et chat avec des produits chimiques, notamment avec de lâeau de javel ou du gel hydro-alcoolique, une vraie catastrophe !
Face Ă ces constats, nous avons menĂ© une incroyable campagne pour faire face Ă ce type « inconscient » de maltraitance. Beaucoup dâassociations notamment la SPA nous ont contactĂ© pour les aider Ă prendre en charge des animaux qui se sont retrouvĂ©s du jour au lendemain seuls, soit Ă cause des hospitalisations de leurs maĂźtres ou pour dâautres raisons.
GrĂące Ă notre communautĂ©, nous avons sauvĂ© des centaines dâanimaux. Ăa peut paraitre peu mais pour nous, câest juste Ă©norme !
Nous continuons notre mobilisation sur cette 2Úme vague et nous espérons relancer un nouvel élan de solidarité autour de Pabete pour venir en aide aux animaux, véritables victimes collatérales de ce virus et dont on ne parle pas assez.
Intéressé.e par la plateforme ? Vous souhaitez apporter votre aide à des maßtres et animaux en détresse? Vous pouvez vous inscrire directement ici : https://pabete.com/inscription-pabete.php
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